06/10/2005

Laissons place aux textes un peu.

Des rais de lumière rendent visibles un gris qui est intrus dans l’air. De plus en plus, cette couleur s’intensifie et semble presque palpable. Cette substance légère devient un mur qui obstrue ma vision. Il s’apparente bientôt à un linge léger qui dévoile des formes floues derrière lui. Il se déchire lentement sans heurt. Ses lambeaux forment des animaux fantasmagoriques aux contours sans cesse changeants. Oiseaux majestueux qui dévoilent leurs ailes dans un pur silence, dragons crachant du feu sans chaleur dans ce ciel aux nuages de fumée que je dissipe dans un souffle. L’odeur de tabac est le souvenir de cet instant éphémère et me prouve que je n’ai pas rêvé ces métamorphoses comme Maupassant n’a pas rêvé son Horla.



Le saké est de mauvais goût aujourd’hui. Le liquide, habituellement chaud et agréable comme du lait, est froid, même à la température de mon corps. Il s’écoule rapidement, jusqu’au cœur et le gèle. Celui-ci brûle dans un ultime soubresaut d’orgueil. Je ne l’entends plus dans son apathie. Je ne veux même pas écouter ses derniers mots. Le saké est de mauvais goût ce soir. S’étant chauffé auprès de mon cœur, il brûle mes entrailles et les tord en tous sens. Je le contiens tant bien que mal, pour cette douleur qu’il m’apporte et me fait me sentir vivant, étant donné que mon palpitant n’opère plus aucun mouvement. Des entrailles, il rebrousse chemin. Il monte à la tête, devient le seul occupant de cette cavité qu’il creuse. Il creuse et creuse. Si profondément, jusqu’à mon âme. Acculé jusque là par mon ennemi, je me livre. Le voilà qu’il sait tout de moi, Le voilà qu’il boit mes paroles, le voilà. Du coin le plus sombre de mon âme, endroit que je ne soupçonnais même pas d’exister, j’entends quelques notes s’assembler pour se fondre en une mélodie. Elle ranime mon cœur en même temps qu’elle soigne mes douleurs. Le saké coule encore, redevenu chaud et agréable. Il est de bon goût cette nuit et me fait coucher l’esprit plus léger.

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